CHR Numérique est une scale-up brestoise qui a été créée en 2013, par un ancien restaurateur. Elle est spécialisée dans la digitalisation des processus de traçabilité et de qualité des métiers de bouche. Les métiers de bouche, c'est la restauration, mais c'est aussi artisan de boucherie, boulangerie, cantine... Ces métiers sont soumis à des contraintes très strictes avec un ensemble de contrôles obligatoires autour de la traçabilité et de la qualité, appelé l'HACCP. Auparavant, tous ces contrôles étaient réalisés sur des feuilles volantes, des étiquettes papiers qui n’étaient pas rangées au même endroit voire pire, qui étaient régulièrement perdues. De plus, il fallait avoir une routine très stricte pour ne pas oublier de vérifier la température des frigos par exemple. En 2013, la solution E-PACK, pensée et créée par CHR Numérique est unique sur le marché. L’objectif était d’avoir un outil solide, ludique et simple à prendre en main, permettant de centraliser au même endroit tous les contrôles HACCP réalisés. Encore aujourd’hui même si la concurrence est désormais présente, l’entreprise avec 15 000 clients reste numéro 1 en France. À noter que seulement 10% des métiers de bouche sont aujourd’hui équipés, ce qui permet de belles progressions dans les années à venir. L’entreprise a réussi à se différencier en ayant une approche premium et en accompagnant ses clients de l’installation à la formation à l’utilisation de leur produit. À l’inverse, leurs concurrents ont une approche SaaS en donnant accès à un logiciel sans toutefois accompagner le client dans la prise en main du produit.
Aujourd’hui, l’entreprise fait face à une problématique très souvent identifiée chez les start-ups / scale-ups qui ont grossi rapidement sans vision produit initiale. Après 10 ans d’existence et pour convertir de nouveaux clients, les développements du produit se sont faits au gré des opportunités commerciales. Par conséquent, le produit compte aujourd’hui 43 modules dont certains qui répondent uniquement à un ou quelques clients. À l’heure actuelle, il y a une énorme complexité fonctionnelle et dette technique : les process de mise à jour sont très lourds, les régressions nombreuses et fréquemment en cascade.
Quelle est la problématique et la volonté de CHR Numérique lors de sa rencontre avec WeFiiT ?
Après 10 ans d’existence, de gros changements sont en train de s’opérer :
Le nouveau CEO souhaite remettre le produit au centre des préoccupations pour devenir une entreprise product-centric et conserver son leadership sur le marché de la sécurité alimentaire.
L’objectif de faire appel à WeFiiT est d’aider l’entreprise à basculer dans ce nouveau modèle, en aidant la future Direction Produit à se construire autour d'une vision et d'une stratégie claires, construites avec l'ensemble de l'entreprise.
Dans une organisation product-centric, le but sera de générer de la valeur auprès de nos utilisateurs à travers le développement d'un produit fort et de toute l'expérience qui l'entoure. Mais également de pouvoir être plus réactive et flexible face aux besoins fluctuants du marché, grâce à de nouvelles pratiques agiles. L’objectif sera donc de créer une culture, des pratiques et des modes de fonctionnement permettant d'itérer rapidement, tout en étant drivée par l’impact & la valeur (outcome) plutôt que par la livraison de fonctionnalités (output). On bascule donc d’une prise de décision orientée par le business à une satisfaction des besoins des clients et des évolutions du marché.
Qu'est-ce qu'on met derrière une mission de conseil et comment se différencie-t-elle d'une mission en immersion ? Lors d’une mission en immersion on va venir apporter à notre client une expertise sous la forme d'un profil, pour une durée allant de 6 à 36 mois. Le consultant va être un membre de l’équipe à part entière et va travailler quotidiennement avec les membres de l’entreprise. À l’inverse, sur une mission de conseil, on va aller au-delà de l'expertise en apportant également une démarche et des solutions à une problématique exprimée par notre client. Souvent, la durée d'une mission de conseil est beaucoup plus courte, comme dans le contexte de CHR Numérique où la mission a duré 6 semaines, et le consultant bien souvent ne va pas travailler directement avec les équipes, mais plutôt analyser l’entreprise d’un œil extérieur. Enfin la dernière différence repose autour des livrables. On démarre une mission de conseil en ayant validé l’objectif final de celle-ci : un livrable en général sous la forme d’une solution à implémenter, de recommandations, d’une roadmap, d’objectifs à atteindre...
L’offre en une phrase : Une organisation product-centric, de la vision à l'exécution.
Notre approche repose sur 4 piliers :
La mission a débuté par un kickoff afin de s’assurer que tout le monde était aligné. L’objectif était de partager un plan macro des prochaines semaines et de sensibiliser aux prérequis nécessaires à l’atteinte des objectifs fixés (comme l’accès à des fichiers ou outils pour avoir des chiffres, mais aussi à diverses personnes clés du projet pour mieux comprendre la situation, la vision de chacun, etc.).
Le livrable attendu :
L’objectif de créer une vision produit est de donner une raison d’être alignée à celle de l’entreprise. La première semaine était principalement basée sur la connaissance de l’entreprise, de l’existant, de la perception de chacun sur le produit et sa mission. Les principales actions ont donc été d’interroger tous les acteurs clés sur ces éléments, autant le top management que les équipes métiers travaillant tous les jours sur le produit et avec les clients.
L'objectif de ces échanges étaient de mieux comprendre l‘écosystème de l’entreprise, d'avoir leur avis sur différentes thématiques telles que la mission du produit, ses utilisateurs, le marché et la concurrence.
À la fin de la première semaine, une première synthèse et restitution des connaissances récoltées, et surtout des divergences de point de vue sur comment étaient perçus l’entreprise et le produit, a pu être partagée. Ce premier exercice permet de mettre tout le monde au même niveau de connaissance pour ensuite entamer un travail de définition d’une vision.
Pour définir la vision, un travail autour du Product Vision Board a été réalisé avec 6 acteurs clés du Top Management, IT et Business de l'entreprise. Dans un premier temps, ils ont chacun rempli un exemplaire sans se concerter pour dans un second temps, voir leurs points de convergences mais aussi de divergences n’ayant pas le même rôle ni la même vision de l’état actuel. Ils devaient compléter différentes cases et se poser des questions comme “quelle est la cible de mon produit ?” “À quel besoin répond-il ?” ” Par quel moyen le fait-il ?” “Quel objectif sert-il ?”. Lors de la convergence on va se concentrer sur l'essentiel et sur ces 4 axes : groupe, besoins, produits et objectifs business. C’est cela qui marque la vision produit et qui permet ensuite d’en découler une stratégie pour les 5 prochaines années.
Pour résumer, la vision produit a été créée suivant ces étapes :
Pour la stratégie, nous avons proposé comme base de travail le Lean Canva. Pour cette phase il est important d’embarquer le futur Head of product et le CTO. Comme pour le Product Vision Board, en premier, il est important de réaliser un état des lieux du produit actuel. Cette étape permet par la suite de mettre en parallèle le Product Vision Board et le Lean canva pour identifier le delta du produit actuel versus la vision établie. D'où est-ce qu'on part et où est-ce qu'on veut aller ! L’objectif n’est pas de leur donner une stratégie mais qu’ils puissent la construire en fonction de leurs expériences (beaucoup sont dans l’entreprise depuis la création). Notre rôle va consister de les aider à se poser encore une fois les bonnes questions, à prendre de la hauteur sur leur quotidien, à créer une synergie entre la vision et la stratégie en prenant en compte les grands piliers produits stratégiques et ce qui est déjà dans les tuyaux (même si tout ne sera pas gardé). Par exemple, d’un côté il y a une V5 à délivrer qui s'affranchit de toute la dette technique, une transformation en profondeur du socle technique, une expérience utilisateur à optimiser, le renforcement de la proposition de valeur et la création d’un plan de tracking pour mesurer le produit. En fait le produit actuel n'est pas mesuré, les décisions sont basées sur des suppositions. Par conséquent, pour devenir product-centric la partie tracking n’est pas optionnelle et un des piliers de la stratégie doit être réalisé sur quelle solution de tracking utiliser, comment implémenter le plan de marquage à réaliser et comment analyser les données remontées. D’un autre côté, il y a les enjeux business comme d’augmenter les ventes ou faire de l’entreprise une entreprise à mission pour donner du sens.
La stratégie à 5 ans de l’entreprise doit par conséquent prendre en compte tous ces aspects !
Donc à la fin des 3 premières semaines on se retrouve avec une vision d’entreprise et une stratégie qui comporte plusieurs piliers.
Comme pour les 3 premières semaines, pour attaquer cette nouvelle phase, il était important de créer un kickoff pour resensibiliser toutes les parties prenantes à l’importance de l’exercice et au temps nécessaire que chacun devrait accorder.
Lors de la nouvelle phase de 3 semaines et en reprenant le travail réalisé ensemble depuis 3 semaines, les OKR ont pu en découler de manière fluide et grâce à un échange pour mettre tout le monde d’accord sur les 4 grands objectifs à atteindre lors des 18 prochains mois. Pour qu’un OKR soit pertinent, il doit être créer en étant assez explicite sur l’objectif tout en ne mettant pas de chiffres qui seront intégrés aux résultats clés. Cela semble simple au premier abord mais c’est le fruit de longues discussions et d’itérations.
Quand les objectifs et les résultats clés furent validés, il était temps de pouvoir construire une roadmap basée sur l’impact et non les fonctionnalités.
Pour cela, on s'est appuyé sur l’arbre des opportunités, une méthode imaginée par Thérèsa Torres qui est de plus en plus populaire. Elle permet en premier d’avoir une vision très claire sous forme d’un arbre de tous les résultats clés (KR) à atteindre et des initiatives pour les atteindre et enfin de toutes les solutions testées pour valider l’initiative et contribuer au résultat clés. Sous chaque résultat clés, on se pose les questions suivantes :
On ne parle pas solution mais seulement on liste les freins, les opportunités qui permettront d’établir les initiatives. Chaque initiative est associée à un KPI pour mesurer l’impact et confirmer qu’on a bien résolu un problème ou une opportunité. Il est important lors de cet exercice d’avoir une équipe mixte composée de personnes techniques, du produit et du design. Quand toutes les initiatives sont listées il faut par la suite les prioriser pour créer la roadmap pour les 3, 6, 9 prochains mois.
En termes de priorisation, nous avions proposé le Framework RICE que nous avons ajuster en ajoutant un aspect business pour découler sur la priorisation BRICE.
Au bout des 6 semaines, les 4 piliers pour structurer l’entreprise en product-centirc étaient créés.
Dans l’objectif que toute l’entreprise soit embarquée dans le processus, il était primordial de partager le travail réalisé, d’accompagner les équipes actuelles et d’anticiper les prochains recrutements car il manquait de nombreuses expertises comme des UX, des Product designer et des PO. Pour cela en plus de la roadmap produit une roadmap organisationnelle a été construite en parallèle.
Besoin client :
Après 6 semaines de mission conseil pour bâtir les fondations, il a fallu anticiper la mise en place d’une nouvelle organisation en recrutant de nouvelles personnes et en formant des personnes présentes dans l’entreprise. Par exemple, afin d’aider un membre de l’équipe à prendre son poste de Head of Product un coaching hebdomadaire a été proposé pour permettre de guider la personne dans ses choix et qu’il puisse poser toutes les questions auxquelles il a pu faire face.
De plus, comme l’entreprise est dans la région de Brest, il n'est pas évident de recruter des profils spécifiques donc ils ont dû externaliser, réorganiser leur manière de travailler pour inclure des personnes en remote et faire appel à WeFiiT, pour renforcer ses squads avec une PO. C’est un travail de tous les jours qui peut prendre quelques temps à fonctionner sans friction. Lors de cette étape, il est important encore une fois d’embarquer toutes les parties prenantes et de ne pas laisser des frustrations de côté.
Les attentes clients :
En parallèle de la nouvelle organisation et pour qu’elle fonctionne de manière fluide et sans friction, il est important de lister les outils et méthodes déjà utilisés, de faire un tri sans toutefois tout modifier et d’ajouter seulement le nécessaire à réaliser tout le cycle d’une initiative de la Discovery à la Delivery de la solution adaptée et terminer par la release. Il faut que les parties prenantes comme le futur Head of Product ou le CTO puisse faire preuve de leadership et soit moteur pour effectuer ces changements.
Pour conclure, lors de cette mission de conseil, il a fallu revenir aux bases de l’entreprise, pourquoi elle existe pour en découler une stratégie, des OKR et une roadmap. Mais ce travail ne serait rien sans une implication de toute l’entreprise, une remise en question de l’organisation, des process et des outils.
Ce qu’il faut retenir d’une transformation d’une entreprise projet à product-centric :